Dédicaces

Je prends un temps précieux pour mes dédicaces. Ce n'est pas grand-chose, un mot, cinq phrases. Parfois, j'y passe une heure, ou plus.

En amont, j'aurai appelé le commanditaire. C'est un appel sorti de nulle part.

- Bonjour, vous avez commandé sur mon site et...

- Je suis pas intéressée, merci.

Autres records : une heure, deux, trois heures. Nous conversons. Échanges impromptus. Parenthèse du quotidien. Le temps s'ouvre en bol d'air. Les digressions peuvent s’étendre en arborescence ou la conversation rester à l’état de bouture.

Mais je peux le faire, appeler, je le fais, vu que mon nombre de lecteurs se compte encore sur les orteils d'un mille-pattes.
À l'autre bout, personne n'est otage.

- Non, désolé(e), pas le temps. Rappelez samedi ou, vous n'avez qu'à mettre ça... 

Ma formation est dans le sur-mesure. Personnaliser, voilà ce que j'aime faire, provoquer une résonance avec l’âme, trouver les mots justes. C'est comme ça que je définis le sens de ma vie. Cette vibration, je la veux spéciale.

J'aime les tensions entre nous, inattendues, ce saut dans le vide entre inconnus.
Nous savons que pour amortir nos échanges, il y aura un matelas de plumes : l'instant d'après, après avoir raccroché.

Qu'est-ce que c'était que cet appel ? De mon côté, 99 fois sur 100 : Merci.

J'aime cet état de conscience aiguë, de bienveillance. Nous allons rédiger ensemble une dédicace pour vous, un proche, un/une ami(e), un parent. C'est un rendez-vous sans enjeux. On se révèle par tâtonnement. On donne tout soudain pour du signifiant. Un mot, une pensée choisie.

“N’attends rien, surprends !”

“ Au bonheur préfère la joie… ”

 Dans ce jeu de la dédicace, j'ai mes dealers, qui avec une constance amicale continue de diffuser mes pages reliées.
Une commande sonne l'appel. Alors pour qui aujourd'hui ? S'appliquer. Définir en trois phrases le pourquoi du cadeau. 

Je vise le contentement. Et dans cet exercice, je me réserve aussi la possibilité de passer à côté. De rater.

J'écris, quoi qu'il en soit, tout sauf une généralité.

Sur mon site, mes lecteurs sont venus me chercher. C'est une chance.
Sans média, sans pub, presque par hasard, ou grâce au bouche-à-oreille, ils ont trouvé mes livres. Ils me font vivre depuis des années. Les choyer est un retour.

Je dis tout ça parce que 2024 s'annonce incroyable, effroyable et palpitante. C'est une année de ferveur qui s'enclenche et je le sens déjà. Je ne sais pas si j'aurai encore ce temps.

Et en recevant les traditionnelles commandes juste avant Noël, je me dis, la tête dans mes brouillons : ce temps précieux, c'est celui que je veux garder. 

Bien amicalement

Erwan

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