Les vieilles âmes

 

Après un premier salon du livre à Paris, plus que décevant, j’étais préoccupé par un nouveau texte dont le titre me hantait. Je ne voulais pas l’écrire, ne me sentais ni qualifié ni capable. J’étais résistant aux choses spirituelles. Il évoquait des fréquences qui ne m’étaient pas familières. Je voulais poursuivre la rédaction d’un polar très noir sur lequel je m’acharne depuis des années et qui me fait trop peur chaque fois que je relis. Le titre de cet opus, très XIXe siècle, revenait sans cesse à la lisière du sommeil, profitant de mes somnolences pour lancer des idées grisantes. Il m’était impossible de lutter contre, de dormir. Je tournais dans mes draps, énervé, me relevais à contrecœur pour noter des bribes de phrases qui en entrainaient d’autres. Je tentais de me révolter contre lui : « Je n’écrirai pas tes mots, fous-moi le camp ! » disais-je. Chaque jour, il prenait plus l’espace dans mes pensées. Épuisé, j’ai fini par céder : « Nous, les vieilles âmes » est né dans l'urgence, sans précipitation, avec une lenteur extrême, par petites touches imbriquées.

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